bandeau décoratif

La sécurité sociale en 5 vignettes

Vignette n°1. Un vieux truc à jeter ?

Le pacte social de 1944, fondement de notre sécurité sociale, visait à «nous protéger des aléas de l’existence». Serait-ce devenu inutile ? A l’évidence, non. Non quand nous sommes malades, non quand il manque des postes de travail, non quand nous sommes trop âgés pour travailler.

Faudrait-il succomber à la mode du privé ? Non. Le privé marchand ne peut assurer des prestations justes pour tous, il exclut des catégories de population (les malades chroniques, les handicapés, etc), il consacre une part des cotisa­tions à la rétribution du capital. Enfin, le privé morcèle le marché, alors que les statisticiens nous montrent qu’il est plus rentable d’assurer un très grand nombre de personnes qu’un petit nombre, Alors, la sécu, on fait quoi ?

 

Vignette n°2. Une maison à rénover

Durant les trente premières années de son existence, la sécurité sociale est en expansion. On élargit les prestations à un plus grand nombre d’assurés, tels les indépendants, les handicapés et d’autres encore. Dès la crise pétrolière de 1974 et lors des crises suivantes, les politiques néolibérales et leurs mesures d’austérité vont conditionner la hauteur de certaines prestations au statut social ou à la durée. C’est l’apparition du statut de cohabitant, toujours très décrié aujourd’hui et des allocations de chômage dégressives dans le temps.

Ainsi, et c’est une caractéristique de la sécurité sociale en Belgique, notre modèle offre des prestations limitées à un très grand nombre. Il maintient les personnes juste au-dessus du seuil de pauvreté et fait bien des déçus.

 

Vignette n°3. Pour rénover, il faut des sous !

Bon an mal an, la protection sociale (l’ensemble des prestations sociales, soit la sécurité sociale et le revenu d’inté­gration), représente 30 % du PIB. Ce n’est certes pas rien. Cela coûte trop cher, dirons certains. Attention, ce n’est pas directement un coût, mais bien une épargne. On met de côté pour ses vieux jours, pour les périodes de maladies, pour quand on n’aura plus de boulot. C’est aussi une boucle redistributive qui a une répercussion positive non négli­geable sur la consommation des ménages, soit un constituant important… du PIB.

Cependant, les mêmes politiques néolibérales que nous avons déjà évoquées font une fixation sur la diminution du coût du travail pour rendre nos entreprises compétitives. Il faut donc faire des cadeaux aux entreprises en bradant les cotisations à la sécurité sociale. Bien entendu, il fallait, pour compenser cela, augmenter d’autres sources de financement (par des transferts de la TVA) et limiter les prestations. On ne s’y serait pas pris autrement si on avait voulu rendre le service peu attractif et pousser les gens dans les bras du privé.

 

Vignette n°4. Ce sont surtout les travailleurs qui paient

70 % du financement de la sécurité sociale repose sur les cotisations des travailleurs. Ce sont donc les les revenus du travail qui financent la sécurité sociale quand les revenus du capital (revenus mobiliers) et les revenus immobiliers ne la financent pas du tout. Or, depuis les premières années de crises, ce sont les revenus du travail qui ont été le plus impactés par les politiques d’austérité, pendant que les revenus du capital augmentaient tendanciellement. En outre, c’est injuste et illogique, les secteurs à haute intensité de main-d’œuvre participent plus à la sécurité sociale que les autres.

Il faudra trouver une autre répartition du financement. C’est un sujet compliqué, il n’y a pas de recettes miracles, le financement n’est pas neutre. Il y a toujours des gagnants et des perdants. La France a introduit, durant la prési­dence de François Mitterrand, la cotisation sociale généralisée. Il ne s’agissait pas de faire porter le financement de la sécurité sociale sur les entreprises, mais au moins il s’agissait de le faire porter sur l’ensemble des revenus : du travail, mobiliers et immobiliers notamment. Pérenniser notre modèle implique au minimum d’avoir un débat sérieux sur son financement.

Bon, et alors, il suffirait de diversifier les sources de financement et d’augmenter ce dernier ?

 

 

Vignette n°5. D’autres chantiers

L’universalisation. Fondamentalement, nous sommes couverts parce que nous sommes des travailleurs. Cela en­gendre des inégalités, notamment au moment de la pension ou face au chômage. Une autre façon de faire serait, comme dans les pays nordiques, d’ouvrir le droit à la sécurité sociale à tous les citoyens, que l’on ait travaillé beau­coup, peu, pas du tout. Mais cela implique d’en revoir sérieusement le financement afin que tous les revenus y participent.

L’individualisation des droits. Bien des associations se battent contre cette mesure injuste. Il n’est pas normal de subordonner le niveau d’une prestation sociale à la composition du ménage. Pourquoi deux personnes qui ont cotisé devraient bénéficier de prestations différentes en fonction de leur situation de ménage ?

Des prestations suffisantes. Les prestations actuelles sont trop basses. Comment vivre seul dignement avec un reve­nu de 1400 € et un loyer à payer.

Et ne pas oublier que si rien ne se passe, c’est tout bénéfice pour les assurances privées. Le capitalisme a besoin conti­nuellement de nouveaux marchés. L’assurance sociale en est un, qu’il n’a pas encore pu totalement s’approprier.

Oui, mais alors ? Le retour de l’Etat-providence ? Et pourquoi pas ?